Vivre de sa musique, voilà qui soulève bien des questions à la croisée des stéréotypes, lumière sur un connaisseur.
C’est dans son appartement du 19e arrondissement de Paris où il vit depuis 15 ans qu’on retrouve Nicolas Deutsch. Un homme à la chevelure éparse et à la barbe grisonnante, sa chemise à carreau et le skate à ses côtés dénote une jeunesse d’esprit bel et bien présente. C’est une grande pièce à vivre où cet imposant instrument aux courbes féminines qu’est la contrebasse côtoie un piano ouvert, des basses… Nous sommes bien dans l’appartement d’un musicien et compositeur : à l’image de sa vie, imprégné de musique.
Nicolas fait partie à l’origine de ces musiciens dits « sideman » qui accompagnent, dans son cas les plus souvent à la contrebasse ou à la basse, des artistes aux sonorités variées.
« Il s’agit de ne pas s’endormir, dans ce métier tu peux vite tomber là-dedans. »
Nicolas Deutsch est intermittent du spectacle, un statut dont bénéficient les artistes et techniciens du spectacle. Ce statut, peu connu du grand public, est cependant souvent présent dans les actualités au terme des revendications qu’il engendre. En effet, même s’il est relativement privilégié, la France étant un des rares pays à avoir délivré un statut et système d’indemnisation aux artistes, il n’en garantit pas pour autant plus de stabilité professionnelle.
Les périodes d’ascension suivies de périodes creuses, cela est un rythme professionnel qui peut rapidement amener au découragement, si ce n’est à la reconversion pour certains. Nicolas Deutsch, musicien depuis le début des années 90 a vite intégré cet aspect-là de son métier. Entre projets inachevés, rémunérations inexistantes, promesses non-tenues ; il a connu des périodes de doute et de remises en question et sait qu’il en connaîtra sûrement d’autres mais il en a tiré une conclusion :
« Je pense que la clé c’est de s’économiser, tout en continuant à travailler. Je m’impose chaque jour d’essayer de composer un nouveau truc, avoir de petits objectifs. Il faut garder un cadre, s’entretenir musicalement, aller chercher de nouvelles sonorités ou pourquoi pas essayer de jouer d’un nouvel instrument pour éveiller autre chose. »
Une quête de renouveau
Éveiller autre chose, c’est sûrement ce qui est à la genèse du parcours qu’il a dessiné au fil des années.
Une fois sideman pour des artistes comme Emilie Simon, Thomas Fersen, ou encore Petula Clark ; une autre fois réalisateur pour des projets comme Imbécile un disque scénarisé et évoluant en pièce de théâtre chantée. Il a également collaboré sur des musiques de film tel que Dans les cordes de Magaly Michel-Serrano, sorti en 2006 ou encore sur des musiques de pubs. Et c’est toujours dans une démarche de transmission et de quête de renouveau, que ce quarantenaire a dispensé des cours en banlieues afin d’initier à la musique des jeunes en difficultés scolaires à l’école Musi’terriens.
Tantôt derrière son ordinateur face à sa table de mixage, tantôt sur les routes de tournées. Ce multi-instrumentiste a su se réinventer à travers ses expériences : des rencontres, des voyages, de la musique.
Lorsqu’on l’interroge sur ce qui lui plaît dans la musique et par conséquent ce qui le fait rester dans un milieu qui s’est vu devenir de plus en plus rude ces dernières années, il répond simplement :
« Être toujours dans l’imagination, la créativité, l’essai. »
Margot